SOUSTELLE, Jacques. Les aztèques à la veille de la conquête espagnole.
Pag 22 Cependant, en marge des villes brillantes et riches,
l paysan –nahuatl, otomi, zapotèque,
etc.- continuait à mener sa vie patiente, laborieuse et obscure. Nous ne savons
presque rien de lui, de ce maceualli dont
le travail alimentait les citadins. La sculpture le représente quelques fois,
vêtu seulement de son pagne, car les manteaux brodés lui demeuraient
inaccessibles. Sa hutte, son champ de maïs, ses dindons, sa petite famille
monogamique, son horizon étroit n’intéressaient pas les chroniqueurs indigènes
ou espagnols, qui l’ont mis pour ainsi dire entre parenthèses dans leurs
histoires et leurs descriptions. Il faut pourtant bien le mentionner ici ne
serait-ce que pour faire sentir, autour
de l’éclat de la civilisation urbaine, sa présence silencieuse, dans la
pénombre. Et cela d’autant plus qu’après le désastre de 1521, après
l’effondrement total des pouvoirs et des idées, des structures sociales et des
religions, lui seul à survécu et survit encore.
Pag 30 Qu’une grande ville ait pu surgir et grandir dans des
telles conditions, par l’effort d’un peuple sans terre, est un véritable
miracle d’ingéniosité, de l’opiniâtreté de ces hommes. L’orgueil qu’ils montrèrent
plus tard n’était pas injustifié.
Pag 47 L’éclectisme religieux des Aztèques les conduisait,
en effet, à rassembler auprès de leur dieu national le plus grand nombre
possible de divinités originaires de toutes les parties de l’empire.
Pag 50 – et ils avaient sous la main tambours t flûtes,
sonnailles et hochets, masques, perruques, vêtements de divers provinces, pour
satisfaire à toutes les demandes de leur maître ;
Pag 60 Et la nuit, chacun le sait, est le règne des êtres
mystérieux et farouches qui surgissent aux carrefours, de Tezcatlipoca qui
défie les guerriers, des lugubres Ciuateteo,
monstres féminins qui hantent les ténèbres.
Pag72 On est riche parce qu’on est honoré, on n’est pas honoré
parce qu’on est riche : il est du reste impossible à un membre de cette
classe dirigeante de s’enrichir autrement que par ses exploits.
Pag 78 […] il devenait tlamacazqui,
« prête », et pouvait désormais porter ce titre vénéré. C’est en
effet, celui qu’on donnait à Quetzalcoatl, à la fois dieu, roi et grand prête
de la fabuleuse Tula.
Pag 84 [sorciers] Le chiffre neuf, qui est celui de
divinités de la nuit, de la mort et de l’enfer, passait pour leur être
particulièrement propice.
Pag92 Ni les historiens indigènes ni les chroniqueurs
espagnols ne se sont attachés à nous décrire la vie des classes les plus
humbles.
Pag 120 Mais voilant cette complexité et cimentant les
éléments divers de la société avec une vigueur
extraordinaire, la religion vivante, dominatrice, indiscutée, imposait à
tous une commune vision du monde et ordonnait par les rites l’existence de
tous.
Pag 142-143 Le climat moral du Mexique ancien est imprégné
de pessimisme. […] Mais ce qui fait la grandeur de ce peuple, c’est qu’il a
accepté le monde tel qu’il le voyait. Son pessimisme est un pessimisme actif.
Il ne se traduit pas par le découragement et l’indolence, mais par l’ardeur
apportée à la guerre sacrée, au service des dieux, à la construction de cités,
à l’expansion des empires. Confronté avec un univers impitoyable, l’homme
mexicain réagissait sans illusion, mais avec une énergie indomptable, en
aménageant à force de peine et de sang la vie précaire que les dieux lui
concédaient.
Pag 153 (Tezcotzingo) [] dans cette cour avaient lieu des
danses et d’autres représentations de plaisir et de passe-temps…
Pag 192 La nuit, redoutée et attirante à la fois, offrait
des heures sombres aux visites les plus importantes, aux rites les plus sacrés,
au secret des amours guerriers avec les courtisanes.
[…]
Ainsi passait la nuit, sans que jamais un regard humain
cessât de fixer la voûte céleste dans l’attente toujours angoissée du lendemain
qui n’arriverait peut-être pas.
Pag 203 Il est remarquable qu’à cette époque et sur ce
continent un peuple indigène de l’Amérique ait pratiqué l’éducation obligatoire
pour tous et que pas un enfant mexicain du XVIème siècle, quelque fût son
origine sociale, n’ait été privé d’école. Il suffit de comparer l’état des
choses avec celui qui nous montrent notre Antiquité classique ou notre Moyen
Age pour vois avec quel soin la civilisation autochtone du Mexique, en dépit de
ses limitations, veillait à former sa jeunesse et à façonner ses citoyens.
Pag 252 Le Mexique ancien nous offre donc un cas très net de
communauté culturelle superposée à la division politique, communauté fortement
senti, qui prenait la forme traditionnelle du mythe toltèque ; ce mythe
d’ailleurs, étant riche en éléments historiques mêles à des représentations
symboliques.
Pag 255 [] disait un père à son fils « il faut que ce
soit la vérité de ton cœur, devant notre dieu (Tezcatlipoca). Que ton humilité
ne soit pas feinte, car alors on t’appellerait titoloxochton (hypocrite), ou titlanixiquipile
(homme qui feint) : car notre seigneur dieu voit ce qui est dans les
cœurs et connaît toutes les choses secrètes. »
Pag 272 En fin on trouve les éléments d’un art dramatique
dans les ensembles de récitations, de chants, de danses et de musique, où les
acteurs déguisés personnifiaient des héros historiques ou mythiques et qui
comportaient des dialogues.
Est-ce que mon cœur s’en ira
comme les fleurs qui
ont péri ?
Mon nom ne serait-il rien quelque jour ?
Ma renommée ne sera-t-elle rien sur la terre ?
Au moins des fleurs ! Au moins des chants !
Comment mon cœur fera-t-il ?
Ah ! c’est en vain que nous passons sur la terre.
Lecture très conseillée, un incontournable si l'on veut mieux comprendre la pensée actuelle du Mexique.
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